Critique de livre : « Monica », de Daniel Clowes

Critique de livre : « Monica », de Daniel Clowes

Si, comme l’écrit la poète Nayyirah Waheed, nos mères sont notre premier pays, alors pour Monica, c’est un pays dont elle ne s’est jamais remise des calamités. Ne voulant pas (ou incapable) nouer de véritables attachements, privée de tout passé et sans grand avenir, Monica, la quarantaine, décide finalement de retrouver sa mère et de découvrir la vérité sur son abandon – et, ce faisant, de découvrir qui est son père. était.

Parce qu’il s’agit d’une histoire de Clowes, la quête des origines de Monica – d’un moi stable – l’emmène sur des chemins étranges et tortueux. Elle retrace sa mère à travers les revenants déchus de la contre-culture, pour aboutir dans une secte bizarre dont le chef pourrait ou non être son père. Il y a des intermèdes oniriques : dans l’un, Johnny est un détective privé endurci dans une ville en proie à un mystérieux désastre ; dans un autre, un jeune homme sauve sa ville natale d’une invasion surnaturelle pour être récompensé de la pire des manières. Les bandes dessinées gothiques, noires, de guerre, même un aperçu de William Hogarth – tout apparaît, et tous sont vraiment très étranges.

Un air omniprésent d’apocalypse plane sur toutes ces diverses étapes, et cela témoigne du talent de Clowes : il ne laisse jamais le côté eschatologique des choses submerger l’histoire, ni celle de Monica. Notre narratrice n’a peut-être aucune idée de qui elle est vraiment, mais Clowes ne perd pas la trace d’elle ou de son désir humain tenace d’un lien maternel qui lui soit propre.

La quête de Monica, malgré tous ses écarts extrêmes, aboutit à quelque chose comme une conclusion ; elle obtient certaines des réponses qu’elle cherche, mais pas celles qu’elle aurait souhaité. « C’est un sacré coup de découvrir, après toute une vie de fantasmes de contes de fées, qu’on n’est pas vraiment spécial », dit-elle. « Juste le fœtus non désiré… pris dans un moment historique déroutant. »

Le dernier chapitre du roman présente une Monica vieillissante « dans un état de quasi-satisfaction, vivant sans sexe et invisible… attendant que la sécurité sociale entre en jeu ». Mais le quasi-satisfaction n’est pas la même chose que le contentement, et les réponses ne sont pas la même chose que la guérison. Un nouveau venu offre la possibilité de nouer le genre de lien romantique qui a échappé à Monica toute sa vie, mais malgré toutes les années et tous les kilomètres, Monica est toujours la fille de sa mère. Elle ne peut pas se libérer du « vide noir qui pourrait (ou non) m’envahir si/quand j’arrêtais de bouger ». Il semble qu’elle ne puisse pas non plus se libérer de l’appétit de destruction de sa mère.

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