Critique de livre : « Toute personne est le seul soi : essais », par Elisa Gabbert
« Toute personne est le seul soi » est le septième livre de Gabbert, et bien que rien dans ce livre ne soit morbide, la mort assombrit le texte tout au long. Bien sûr, réfléchir sur Covid invite à penser à la mortalité, mais elle écrit également sur le décès de son beau-père, le suicide de Sylvia Plath et la tendance récente à dénoncer les livres d'écrivains décédés, comme si c'était « une mauvaise forme de mourir ». (Gabbert, à juste titre, juge cela à la fois ringard et étrange.)
Mais dans la littérature, Gabbert trouve non seulement la vie après la mort – elle parle de la « métalife » de l’écriture – mais aussi une raison de vivre et de s’engager dans le monde. « Toute personne est le seul soi » semble décidément différent du travail de quelqu'un qui envisage de se retirer de l'écriture. Il s’agit plutôt d’une expression de gratitude à la fois pour l’acte de lire en lui-même et pour la lecture en tant que voie de conversation, moyen de socialisation, moyen de se connecter.
En fait, les essais les plus ciblés du livre (un sur Proust, un sur le temps dans « Frankenstein », un sur Leonora Carrington) souffrent en grande partie du fait qu'ils troquent cet engagement social contre l'air chaud des articles de littérature supérieure, qui, trop souvent, sont rédigés uniquement en dialogue avec des textes assignés. Leur tension attire également l'attention sur le penchant de Gabbert à arrêter brusquement ses essais plutôt que de tirer de véritables conclusions. «Je préfère les livres qui semblent un peu faux, inachevés ou impossibles à prouver», écrit-elle à un moment donné. Mais cette phrase apparaît dans un livre qui offre sporadiquement de nombreuses preuves de ses idées, au moyen de citations détaillées de « Swann's Way » ou « The Hearing Trumpet ». Aussi intentionnel que cela puisse être, cet écart semble choquant et inadapté.
Cependant, lorsque Gabbert se laisse aller à une certaine liberté thématique, les fins ouvertes de ses essais provoquent admirablement davantage de réflexion. Il en va de même pour leur catholicité, leur enthousiasme, leur capacité à lier des sujets disparates. Dans « Party Lit », qui commence par « Gossip Girl » et se termine par « Appointment in Samarra », Gabbert reproduit le tourbillon aléatoire d’une bonne soirée. Dans « Same River, Same Man », elle réalise une double ode à « Rabbit, Run » (un roman d'homme mort souvent dénoncé que, comme Gabbert, je continue de vénérer) et au thriller de 1991 « Point Break ». Et dans « Infinite Abundance on a Narrow Ledge », un autre énoncé de mission pas vraiment, elle unit Rilke et le design de la maison, en s'appuyant fortement sur les écrits de l'architecte Robert Venturi, qui recherche une « vitalité désordonnée », des « contiguïtés violentes » et des « juxtapositions chaotiques ». » dans un immeuble ou une rue.
Si Gabbert avait laissé le désordre et le chaos dominer, « Any Person Is the Only Self » aurait été une collection presque parfaite. Dans l’état actuel des choses, lorsqu’elle laisse ces éléments ressortir, son travail chante.