Revue de Stuck Monkey par James Hamilton-Paterson – nos addictions mortelles

CArrivant à une clairière, un singe voit une banane savoureuse dans un bocal. Il tend la main et l’attrape, mais se retrouve ensuite incapable de sortir à la fois sa main et le fruit. Plutôt que d’abandonner sa prise, le singe reste là, immobilisé, jusqu’au retour des humains qui ont tendu le piège à singe. Cette méthode de chasse peut-être apocryphe fournit la métaphore directrice du livre du poète et romancier Hamilton-Paterson. Nous sommes tous ce singe coincé, refusant de lâcher les friandises de la civilisation moderne qui nous condamneront sûrement.

Il s’agit d’une énumération très détaillée et révélatrice des coûts environnementaux de plus ou moins tout ce qui rend la vie moderne agréable et amusante, ou simplement moderne. Hamilton-Paterson a un sens aigu du fait sombre et absurde : « L’Australien moyen achète vingt-sept kilos de vêtements neufs par an et en jette vingt-trois à la décharge. » L’aviation et la mode rapide, nous le savons, sont destructrices pour l’environnement, mais presque tout le reste aussi. Posséder un chat ou un chien, par exemple : un chapitre fascinant sur Big Pet Food note que si l’industrie des aliments pour animaux de compagnie était un pays, elle se classerait au cinquième rang des consommateurs de viande au monde. (Les scientifiques de l’alimentation pour animaux de compagnie, nous dit-on, travaillent assidûment sur sa «cravabilité».) Le sport automobile est mauvais de manière évidente; le football un peu moins évidemment, avec des équipes prenant des vols intérieurs de 20 minutes pour les matchs à l’extérieur ; plus ironiquement, les terrains de golf, tout en offrant un simulacre de nature soignée, lui nuisent eux-mêmes avec leurs besoins en eau démesurés.

Même le jardinage, célèbre recommandé par Voltaire comme antidote au désespoir existentiel, s’avère ici être un péché environnemental, reposant sur des pesticides tueurs d’abeilles, des espèces importées et de la tourbe extraite de tourbières où, si elle n’est pas inquiétée, elle agit comme un puits de carbone. Dans l’une des petites incohérences qui parsèment l’argument, Hamilton-Paterson déplore la disparition du feu de joie du jardinier traditionnel, alors même qu’ailleurs il attribue une grande partie des dommages environnementaux que nous causons à notre obsession de brûler des choses. Au moins, pendant les feux de joie mémorables de sa jeunesse, il rapporte avec victoire, « une agréable mélancolie de eheu fugaces parfumé ses rêveries banalement philosophiques sur les saisons et la mort ».

Allié à son inventaire implacable des conséquences écologiques involontaires du simple fait de vivre sa vie comme une personne moyenne du 21e siècle, il y a une souche de dénonciation souvent amusante et splénétique de la bêtise contemporaine : la jardinerie au détail avec son « royaume du tat sans honte » ; la « terrible vertu du tourisme vert et ses clichés » ; ou la loi sur la mode qui dit prétendument que « plus la vie urbaine devient monotone, plus il faut s’habiller comme pour un raid commando sur l’île de Tracy ». Pendant ce temps, Hamilton-Paterson diagnostique astucieusement « l’industrie du bien-être » comme un symptôme de la précarité des soins de santé intégrée au système d’assurance américain, et qui, dans son mélange de « panique privée, d’ignorance scientifique et d’idéologie farfelue », bascule facilement dans l’anti- théories du complot vaccinal.

Reste à deviner à quoi le livre est destiné. Avec ses coups plutôt méchants sur Greta Thunberg et al (« saintes écolières stridentes »), il rejette l’idée que les politiciens ou les entreprises prendront jamais des mesures efficaces contre le grand incendie ; l’auteur ne suppose pas non plus que les civils adopteront un renoncement communautaire au consumérisme industriel. Hamilton-Paterson est enthousiaste et bien informé sur le passage progressif à des sources d’électricité plus vertes (tout en étant à juste titre sceptique à l’égard des boosters à hydrogène), suggérant même que la navigation commerciale devrait passer à la propulsion nucléaire. En même temps, il se moque de tout espoir général d’atténuer les catastrophes grâce à la technologie comme une simple « positivité sans cervelle ». L’être humain lui-même est décrit comme « la maladie de la planète », mais nous sommes désormais dans « la phase finale de l’histoire d’Homo sapiens ». Stuck Monkey est donc finalement plus un long rugissement de retrait face aux absurdités du monde moderne, longtemps jugé trop pervers pour valoir la peine d’être sauvé.

Stuck Monkey de James Hamilton-Paterson est publié par Head of Zeus (£20). Pour soutenir le Guardian et l’Observer, commandez votre exemplaire sur guardianbookshop.com. Des frais de livraison peuvent s’appliquer.

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