Critique de livre : « Wonder Boy », par Angel Au-Yeung et David Jeans
Mais il y avait une faille dans l’ingénierie sociale de Hsieh : il essayait de créer une communauté en distribuant de l’argent en masses géantes. Au fur et à mesure qu’il vieillissait, ses amis devenaient plus jeunes et de moins en moins capables de lui dire non. Sa consommation de drogue, autrefois confinée aux festivals, est apparue au grand jour. En 2020, Hsieh reniflait entre trois et cinq grammes de kétamine par jour, selon les auteurs. Il a perdu du poids et a à peine dormi.
Au cours de ses derniers mois, le comportement de Hsieh était de plus en plus paranoïaque et bizarre. Il a exigé que les robinets soient ouverts pour qu’il puisse entendre le bruit de l’eau; il a écrit sur les murs; il a allumé des dizaines de bougies. Il a embauché des sténographes judiciaires pour se tenir là, transcrivant les conversations entre colocataires.
Les amis et la famille ont tenté des interventions, mais ses assistants ont trouvé des moyens de les détourner. Après une visite en août, son ami Jewel, l’auteur-compositeur-interprète, lui a écrit une lettre sévère, l’avertissant que « lorsque vous regardez autour de vous et réalisez que chaque personne autour de vous est sur votre liste de paie, alors vous avez des ennuis ». Mais c’était trop tard. Il était mort à Noël.
Pourquoi personne n’a forcé Hsieh à suivre un traitement ? Au-Yeung et Jeans ont rendu un véritable service en essayant de le découvrir, en interrogeant de nombreuses personnes de son entourage. Leur écriture est frustrante et maladroite, comme si elle avait été écrite à la hâte. Mais le matériau est convaincant, avec la tension croissante d’un désastre au ralenti. Les derniers chapitres, documentant une série d’interventions qui n’ont abouti à rien, sont fascinants.
Le récit de ces derniers mois est presque entièrement tiré de sources anonymes, vraisemblablement les mêmes amis qui étaient là pour le regarder tourner en rond. La famille de Hsieh n’a pas coopéré au projet, et on se demande comment leur point de vue aurait changé l’histoire. Les journalistes ont tendance à se pencher vers leurs sources les plus utiles, et cela semble s’être produit ici. Au final, les auteurs refusent de tenir qui que ce soit pour responsable.
« Ce qui est ressorti des centaines d’heures d’entretiens que nous avons menés avec des personnes qui ont été témoins de la descente de Tony, c’est qu’il n’y avait ni héros ni méchants », écrivent-ils. « Certains acteurs bien intentionnés ont cédé aux tentations de la cupidité, tandis que les supposés mauvais acteurs avaient des histoires compliquées qui donnaient un contexte à leurs rôles. »
Ils arrivent par défaut à une conclusion digne d’un TED Talk : que Hsieh était condamné parce que le bonheur est un objectif intrinsèquement inaccessible. Il pensait « qu’il pourrait construire son chemin vers le bonheur », écrivent-ils. « Il a continué à construire et à acquérir jusqu’à ce qu’il finisse par avoir tout dans le monde – et ce n’était toujours pas suffisant. »