Critique de livre : « La talentueuse Mme Mandelbaum », de Margalit Fox ; « Les Incorruptibles », de Dan Slater
« La talentueuse Mme Mandelbaum » nous offre un idéal platonique du génie criminel. Fredericka Mandelbaum était une jeune femme intelligente de 25 ans lorsqu’elle est arrivée aux États-Unis en 1850 en provenance d’Allemagne. Son mari, Wolf, travaillait comme colporteur et Mandelbaum a commencé sa carrière de la même manière, en vendant de la dentelle de porte en porte dans le Lower East Side. À 30 ans, elle s’était établie comme une « receleuse » fiable, recelant et vendant des biens volés. Transformer le butin en argent liquide est essentiel dans toute économie souterraine. Mais Mandelbaum avait des ambitions plus grandes. Elle a commencé à cultiver sa propre armée de pickpockets, de voleurs à l’étalage, de cambrioleurs, de braqueurs de banques, de perceurs de coffres-forts, d’orfèvres et de vendeurs au marché noir, aidée par des dizaines de policiers, de magistrats et de politiciens sans scrupules.
Bientôt, Mandelbaum commandita des braquages de grande envergure. En 1869, elle réussit ce qui était à l’époque le plus grand cambriolage de banque de l’histoire américaine, volant près d’un million de dollars (près de 20 millions de dollars aujourd’hui). Au milieu des années 1880, on estimait qu’elle avait volé des biens d’une valeur de 10 millions de dollars (environ 300 millions de dollars aujourd’hui). En 1884, la police réussit enfin à rassembler suffisamment de preuves – et de courage – pour l’arrêter. Mais lorsqu’elle fut libérée sous caution, elle s’enfuit au Canada, emportant avec elle un butin d’une valeur de près d’un million de dollars. Elle mourut en exil, tout en continuant à diriger une petite entreprise de recel en Ontario.
« Les Incorruptibles » Le roman reprend le récit là où Fox l’a laissé, dans les années 1890, alors que les immigrants venus de Russie, de Pologne et de Hongrie commençaient à affluer à New York. Slater offre une vision plus panoramique du monde souterrain, en présentant son histoire comme une bataille épique entre les gangsters, avec leurs complices au sein des forces de l’ordre, et un petit groupe de réformateurs juifs – « les Incorruptibles » – qui sont déterminés à nettoyer le Lower East Side.
Beaucoup de ces méchants, comme Big Jack Zelig, Louis « Lefty Louie » Rosenberg et Mother Rosie Hertz, sont des légendes de longue date. Slater donne la vedette à Arnold Rothstein, le tristement célèbre doyen des gangs, qui fut accusé d’avoir truqué les World Series de 1919 et qui inspira F. Scott Fitzgerald pour écrire « The Great Gatsby ». À l’image de Mme Mandelbaum, Rothstein était un visionnaire criminel qui commandait un réseau national de bookmakers, de contrebandiers, de maîtres chanteurs, de trafiquants de drogue, d’escrocs et de représentants de la loi corrompus. Son assassinat en 1928 marqua le début de la fin de la domination juive sur le monde souterrain.