Décès de Richard Crawford, éminent spécialiste de la musique américaine, à 89 ans
Malgré le risque potentiel pour sa carrière, il a écrit sa thèse – puis un livre en 1968 – sur le droit, devenant ainsi l'un des premiers universitaires à consacrer sa vie à la musique des États-Unis.
Son choix s’est porté sur un coup de chance : les préparatifs de la célébration du bicentenaire de la révolution américaine en 1976 ont suscité un nouvel intérêt du public pour la renaissance de la musique ancienne américaine, et M. Crawford a contribué à la construction de son infrastructure scientifique. Il a été membre fondateur de la Sonneck Society, rebaptisée plus tard Society for American Music ; il a écrit la première biographie du compositeur de l’époque révolutionnaire William Billings, avec David P. McKay en 1975 ; et, grâce à un travail bibliographique minutieux, il a exhumé de larges pans du répertoire des débuts de la musique sacrée américaine.
« Les américanistes ont voulu, en tournant toute leur attention vers la musique de leur propre région, prouver la valeur musicologique des études américaines », écrivait-il dans la revue American Music en 2005. L’intérêt n’était pas de découvrir un Bach américain ou d’élargir le canon classique, mais plutôt de déplacer l’attention, comme il l’a dit un jour, « de la Musique avec un grand M à la création musicale ». Pour M. Crawford, l’histoire de la musique était une question de processus, pas seulement de produit ; d’interprétation, pas seulement de composition.
« Ils ne se sont pas intéressés à la beauté, ni à l’excellence, ni à la musique qui avait survécu, mais à toute la musique dont l’existence en Amérique pouvait être documentée », a-t-il écrit à propos de sa génération d’américanistes. « C’est seulement en reconstruisant cette totalité que la vie – le cœur battant, pourrait-on dire – d’une tradition oubliée ou moribonde pouvait être entrevue et une image fidèle de la « forme » historique imaginée. »
Ainsi, son œuvre maîtresse, le livre « America's Musical Life: A History » paru en 2001, ne présente pas un défilé de grands compositeurs et de leurs chefs-d'œuvre, mais plutôt une riche tapisserie musicale, commençant par des chants amérindiens et des psaumes coloniaux et se poursuivant par des chants spirituels afro-américains, des hymnes de la guerre civile, Tin Pan Alley et Philip Glass. Avec une prose claire et pragmatique, M. Crawford place côte à côte les développements économiques et artistiques de la musique populaire, folklorique et classique.